De Pat Törngren
Le portage dit de la Mère Kangourou (en anglais Kangaroo Mother Care - KMC) convient à chaque mère, chaque bébé.
“La peau de la mère reste l’environnement naturel de son bébé mais également l’endroit le plus sain tant sur le plan physique qu’émotionnel » selon le Dr Nils Bergman de Cape Town, chercheur en KMC.
Lorsque le « petit miracle » de Krisanne est né à 24 semaines, elle ne pesait que 795 grammes. Pour la sauver, Kaia a donc été transférée en soins intensifs dans un autre hôpital à 40 km de chez elle et mise sous respirateur artificiel car en manque d’oxygène. Krisanne était anéantie – elle avait donné naissance mais ses bras demeuraient vides. Même lorsqu’elle rendait visite à son bébé et qu’elle le caressait tendrement, Krisanne se sentait totalement inutile. Le cœur de Kaia s’arrêtait chaque fois qu’on la touchait et on ne s’attendait pas à ce qu’elle survive.
Alors, quand le personnel de l’hôpital a donné à Krisanne un fauteuil inclinable et suggéré qu’elle retire sa chemise et son soutien-gorge pour placer Kaia à même sa peau, elle a pris peur : "Kaia était si minuscule et fragile” dit-elle. “J’ai pensé que je la tuerais si je la touchais – peut être qu’encore une fois son cœur s’arrêterait. Mais le personnel m’a vraiment encouragée et j’ai finalement fait un essai. A mon grand étonnement, Kaia s’est tortillée plusieurs fois, s’est lovée contre moi et a fini par s’endormir, d’un sommeil réparateur. Sa saturation d’oxygénation sanguine a si bien augmenté que nous avons réduit son respirateur de moitié!". J’étais aux anges et me suis sentie mère à part entière pour la première fois. Après ça, j’ai fait du peau-à peau avec elle tous les jours et sa santé s’est nettement améliorée » ajoute-t-elle.
Pourquoi tous les nouveau-nés ont besoin de la KMC
Marianne Littlejohn, assistante de recherche en KMC explique que le passage du ventre de la mère au monde extérieur représente une transition colossale pour tout bébé, même non prématuré. Quand nous traversons de gros changements, la première chose que nous recherchons est la sécurité et le confort de quelque chose qui nous semble familier… "Faire du peau-à-peau stabilise le bébé davantage qu’au sein d’une couveuse ou d’un berceau bien douillet", déclare-t-elle. "Le bébé s’en trouve apaisé et réconforté par les battements de cœur de sa mère, son odeur et le son de sa voix." Le toucher maternant et apaisant d’une mère stimule également la respiration de son bébé, gratifié par le goût sucré du colostrum. Cela aide le bébé à relever le défi difficile de sortir du ventre de sa mère pour le monde extérieur.
Les nouveau-nés ont besoin d’être maintenus au chaud le temps que leur température se stabilise et le corps de leur mère en est l’écrin idéal. La température de sa poitrine augmentera de 2 degrés pour réchauffer un bébé qui à froid, et baissera d’un degré pour celui qui a chaud, stabilisant ainsi la température du bébé mieux que n’importe quelle couveuse. Ce phénomène s’appelle la "synchronisation thermique mère-enfant".
"Si la mère a subi une anesthésie est se trouve trop malade pour porter son bébé, il peut tout aussi bien être placé sur le torse de son père. La voix de son père est aussi familière et apaisante et il peut également réchauffer son bébé."
Les pères qui ont bénéficié de ce contact additionnel avec leur nouveau-né ont plus de chances de s’impliquer dans les soins au bébé que les pères qui ont manqué ce contact initial.
Pourquoi les bébés ont besoin de leur mère
"Plus on pratique le peau-à-peau, mieux c’est”, déclare le Dr. Bergman : « Et cela devrait commencer dès la naissance, mais peut aussi être pratiqué n’importe quand, car il apaisera et calmera immédiatement le bébé ».
S’ils sont séparés de leur mère, les bébés commencent à crier de détresse et s’arrêtent seulement quand ils sont trop fatigués pour continuer. Ces cris de détresse sont semblables aux cris de détresse émis par tous les bébés mammifères qui ont perdu leur mère, dans leur tentative de les faire revenir. On appelle cela le “cri du désespoir” (en anglais, "protest-despair" response) car le bébé finit par abandonner si sa mère ne revient pas et arrête de pleurer pour conserver suffisamment d’énergie à sa propre survie.
La raison pour laquelle les bébés (prématurés mais aussi nés à terme) sont en détresse quand ils sont séparés de leur mère est qu’ils savent d’instinct que si elle les abandonne, ils mourront. La mère procure au bébé tout ce dont il a besoin pour survivre : sécurité, chaleur, protection et nourriture. Dans la nature, un bébé séparé de sa mère ne survivra pas très longtemps et ils naissent en étant conscients qu’être avec leur mère est déterminant pour leur survie. Par conséquent toute séparation peut provoquer un taux très élevé de stress aux nouveau-nés, avec des séquelles à long terme sur leur santé physique et émotionnelle. On désigne cette relation mère-bébé sous le nom de « dyade » – binôme qui ne doit pas être séparé mais au contraire maintenu uni dès le moment de la naissance.
Le miracle du “toucher maternel”
S’il y a eu séparation, le “miracle du toucher maternel” fait que dès qu’ils rejoignent leur mère, les bébés récupèrent quasiment instantanément. Leurs rythmes cardiaque et respiratoire se normalisent, leur température se stabilise et l’hormone du stress (le cortisol) redescend à un niveau acceptable.
"Nous pensions qu’il était normal que le rythme cardiaque des bébés en couveuse soient très variables, tout comme une respiration irrégulière et des fluctuations de température" ajoute le Dr. Bergman.
"A présent, nous savons que ce sont des manifestations de la détresse des bébés. Dès qu’il est placé dans le bon “habitat” (le peau-à-peau avec sa mère), ces signes vitaux se normalisent très rapidement. Cela signifie que le bébé n’est plus en situation de détresse et peut utiliser toute son énergie à son alimentation, sa croissance et son développement plutôt qu’à sa survie."
De temps en temps, des prématurés sont également malades et ont besoin d’être sous perfusion, d’être intubés et de recevoir de l’oxygène. "Quand cela est nécessaire, nous pouvons combiner ces gestes qui sauvent aux dernières technologies, avec la méthode Kangourou” déclare le Dr. Bergman. "Ainsi, les bébés bénéficient du meilleur de ces deux mondes. Un prématuré en bonne santé peut être contre la poitrine de sa mère dans sa “poche kangourou” et cette dernière peut se déplacer avec lui avec une perfusion intraveineuse. L’oxygène peut également être administré aux bébés lors du peau-à-peau et ils peuvent tout aussi bien être nourris par intubation dans cette position KMC.
Les bienfaits de l’allaitement des prématurés
L’allaitement est une part très important de la méthode Kangourou, selon le Dr. Bergman. Si les bébés sont trop petits pour téter, on leur intube le propre lait de leur mère, jusqu’à ce qu’ils puissent téter d’eux-mêmes. La nature a tellement bien fait les choses que le lait de la mère qui a donné naissance à un prématuré est très différent de celui d’une mère dont le bébé est né à terme. Le premier contient des nutriments spéciaux qui aident le tout petit bébé à grandir et se développer. Also vitally important are the antibodies present in the mother's milk, which protect the baby from disease.
Le colostrum, un fluide clair, sort du sein de la mère les premiers jours de l’allaitement et est très important pour un certain nombre de raisons. Il est primordial qu’il soit exprimé et ingéré par un bébé trop petit pour le téter. Ce liquide « en or » est hautement nutritif et facilement digéré. Il représente la meilleure nourriture que puisse recevoir un nouveau-né et prépare son estomac à recevoir le lait de sa mère, qui arrivera pour sa part au 3eme jour de l’allaitement. Même si les mères ont choisi de ne pas allaiter, il est recommandé qu’elles expriment leur colostrum et nourrissent au sein leur nouveau-né s’il s’avère qu’il est né prématurément ou qu’il se trouve malade pour une quelconque raison
KMC pour “chaque” bébé
La KMC n’est pas uniquement pour les prématurés. Le passage du ventre de la mère au monde extérieur est un gros cap à franchir pour tout bébé. La manière dont nous les recevons et les traitons lors des premiers jours de leur vie va conditionner leur perception du monde. Nous devons les rassurer sur le fait qu’ils arrivent dans un endroit où ils seront aimés, pris en charge, nourris et soignés. Tous les nouveau-nés en bonne santé devraient être maintenus en peau-à-peau au contact de leur mère. Cette pratique renforce le lien, leur donne un meilleur départ dans la vie (à la fois physique et émotionnel) et favorise le développement optimal de leur cerveau.
"Une fois, on m’a dit que seuls les parents tiraient des bienfaits de la KMC » dit Krisanne. « Je ne suis pas d’accord, j’ai vu les changements majeurs sur mon petit miracle quand je l’ai mise sur mon cœur. Pour les parents, la méthode Kangourou répond au besoin de se sentir mère ou père et nous donne l’opportunité d’être utiles à nos bébés. Pour les prématurés, la KMC permet de réduire les besoins en oxygène, de stabiliser le rythme cardiaque, de les apaiser et tellement d’autres choses !"
Si les bébés pouvaient nous dire ce dont ils ont le plus besoin, ils diraient tout simplement : "Prend-moi dans tes bras, nourris et aime moi ». Les mères l’ont toujours su – et maintenant, c’est la recherche qui le confirme !
Article original "Kangaroo Mother Care: The Magic of a Mother's Touch" traduit par l'équipe d'oummi-materne.com
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2 réactions à Le portage Kangourou : La magie du toucher maternel